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Le sextage : enjeux quant à la sexualité adolescente et prévention

Dernière mise à jour : 30 déc. 2021

Par Isabelle Lefort





Au Canada, il était rapporté en 2014 que 24% des jeunes de secondaire 1 à 5 ayant accès à un téléphone cellulaire avaient mentionné avoir déjà reçu un sexto, c’est-à-dire une photo suggestive d’une personne apparaissant nue ou partiellement nue. Certains auteurs considèrent qu’à l’ère du numérique, le sextage incarnerait la nouvelle forme de socialisation parmi les adolescents cherchant à établir des relations sociales et/ou intimes avec les autres. Le sextage apparaît toutefois comme une préoccupation actuelle émergent des technologies de l'information et de la communication (TIC), en raison de ses implications possibles au niveau de l’exploitation sexuelle, la pornographie juvénile et la cyberintimidation.


Le caractère éphémère des messages transmis par le biais de certaines plateformes (ex. : Snapchat) représente un incitateur à partager des photos ou des vidéos de nature sexuelle. On rapporte, de plus, que c’est un phénomène qui touche autant les filles que les garçons. Cependant, les filles reçoivent davantage de pression à envoyer un sexto d’elles-mêmes, alors que les gars joueraient un rôle actif dans le transfert d’images intimes à une tierce personne. Un double-standard persiste cependant entre les garçons et les filles en ce qui concerne les rôles de genre et le partage d'images intimes n’y échappe pas. À vrai dire, les adolescentes sont traitées différemment des adolescents, en étant davantage sollicitées à envoyer un sexto et, ironiquement, en étant jugées plus sévèrement si elles le font, contrairement aux garçons qui gagnent en popularité ou vivent peu de conséquences pour le même comportement. Au niveau interpersonnel, le sextage a le potentiel de causer un préjudice aux jeunes. D’une part, ceux-ci risquent d’être exposés à du matériel non consensuel ou bien se voir eux-mêmes exposés. D’autre part, les individus sont à risque de subir différentes formes de victimisation, telles que la cyberintimidation et le harcèlement.


Les études qui se sont penchés sur le partage d’images intimes à l’adolescence ont permis d’en identifier les déterminants, dont le plus grand prédicteur est la pression des pairs. Certaines études rapportent d’autres prédicteurs tels que l’habileté à faire face à cette pression sociale, l’âge, l’identification à un rôle féminin hypersexualisé, la conformité aux idéaux culturels de beauté et les normes perçues envers le comportement, comme par exemple que le sextage est une manière de séduire et démontrer son intérêt envers une personne et le niveau plus élevé de sexualisation intériorisée, qui fait référence à l’auto-objectification, c’est-à-dire la croyance que l’attrait sexuel est une caractéristique importante de l’identité. On rapporte également que les adolescents défendent leur recours au sextage en prônant un discours d’empowerment ou d’agentivité sexuelle. À cet égard, il est à se demander si les notions d’empowerment des jeunes femmes par le biais de pratiques telles que le sextage pouvaient simplement renforcer, reproduire et refléter les attentes sexualisées et sexistes hétéronormatives.


En dépit des nombreuses influences auxquelles font face les jeunes à s’engager dans le sextage, cette pratique semble être une cible de préoccupations pour les législateurs et les décideurs. Les jeunes filles sont notamment sujettes à la panique morale de la part d’adultes, en regard de l’âge auquel elles s’exposent. Il est cependant illusoire de croire que nous pouvons encourager les jeunes à ne pas adopter cette pratique, mais qu’il serait plus bénéfique de les encourager à le faire de façon saine et respectueuse, en prônant une approche positive et globale de la sexualité.




Sources :


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